2024 : la bulle bibliophile

Je passe sur le fait qu’une fois encore, j’écris mon bilan un peu trop loin du premier janvier – ça fait des années que ça dure, les excuses ne tiennent plus. Mais qu’est-ce que j’ai donc fait en 2024 ?

J’ai beaucoup lu, et j’ai écrit. Dans l’épisode de l’année dernière, j’ai évoqué que je venais de commencer la rédaction d’un livre sur les usages politiques du jeu de société, sans savoir trop où ça mènerait. Il s’agissait d’un cliffhanger un peu grossier, je savais exactement où je voulais aller. J’étais par ailleurs extrêmement confiant dans le fait de pouvoir tout écrire dans les délais. J’avais même fait un retro-planning. Les choses ont commencé à se gâter quand, au bout d’un mois, j’étais déjà en retard sur le programme. Pourtant je ne chômais pas : je lisais, j’écrivais, je dormais, je mangeais, mais pas grand chose d’autre, si ce n’est les moments passés en famille – ah non, si mes souvenirs sont bons je mettais un casque, parce que sinon je n’arrivais pas à me concentrer pour lire et écrire encore. J’ai dit aux gens pour qui je bossais régulièrement que je n’y étais pour personne pendant quelques mois, ce qui au passage a creusé un joli trou dans mes économies. J’ai commencé par demander un premier report à l’éditeur, puis un second, mais j’ai commencé à vraiment paniquer quand après 5 mois, j’avais seulement couvert la moitié de ce que j’avais prévu. On a convenu d’une troisième report, et il faut croire que j’avais pris le rythme, puisque je suis parvenu à finir la seconde partie en trois mois. Au final, fin octobre, j’ai écrit ma conclusion, revu l’ensemble, et puis j’ai mis mon cerveau dans une boite, parce qu’il était un peu endolori et qu’il fallait le laisser tranquille.

Au final, je suis plus qu’heureux de ce que j’ai écrit. Je n’ai pas le sentiment d’avoir sacrifié ce que j’avais à dire, malgré les délais. Certes, on se dit quel tel ou tel passage mériterait d’être approfondi, qu’on pourrait encore pousser les recherches sur un sujet qu’on a fait malheureusement que survoler. Mais à ce rythme, il ne serait sans doute jamais fini. Je suis prêt à accepter qu’il est imparfait, et sans doute critiquable sur bien des aspects. Ce qu’il contient, je pense, a déjà sa valeur. « Ce n’est qu’un jeu », puisque c’est son nom, sortira donc fin octobre 2025.

J’oubliais : en 2024, malgré tout, j’ai créé un jeu. Il y a quelques années, une ado était venue faire son stage de troisième dans mon petit bureau. C’est maintenant une adulte en dernière année à l’école Pivaut de Rennes, qui suit les cours du gigantissime Pascal Quidault, et elle est revenue faire un stage – mais cette fois en distanciel, parce qu’en juin j’étais justement en plein dans le bouquin. Je ne voulais pas la faire bosser sur rien, alors j’ai ressorti un vieux prototype, et je l’ai remanié pour qu’on y joue avec plein d’illustrations. Comme j’aime bien les jeux pas drôles, c’est un jeu en noir et blanc sur des vagabonds dans une société effondrée, qui souffrent d’aphasie amnésique – ils ont perdu le souvenir du nom des choses. Tout ça devrait aboutir en septembre 2025 sur une microédition en impression à la demande – reste à espérer que d’autres que moi auront de la curiosité pour les jeux pas drôles. On pourra même y jouer avec des sons et en musique – le jeu dispose d’une bande originale réalisée par un musicien qui a accepté de me suivre et de passer du temps sur ce plan foireux, et je l’en remercie encore.

Parallèlement, de loin en loin, le petit collectif avec qui j’avais participé à un résidence fin 2023 a récidivé – on en a refait une en septembre dernier. J’en ai également organisé une au GRAL au printemps, qui a connu un franc succès. Tout ça me fait dire qu’il y a des tas d’auteurs et d’autrices qui sont ouverts au fait d’envisager le jeu de société autrement que par le seul prisme du game design, ou du potentiel éditorial. Avec Julien Prothière, Antoine Tissot, Juan Rodriguez et Agnès Largeaud, nous allons donc publier dans quelques jours le Manifeste Métaludique, auquel je consacrerais probablement un article sur ce site.

Enfin, je ne peux pas finir ce bilan sans citer le jeu du GRAL de cette année, Protocole IOMV2236472L, une création d’Antoine Tissot développée par le GRAL, que j’ai illustrée. Pour la première fois, le jeu du festival Rennes en Jeux est un jeu engagé – c’était une aventure éprouvante, mais je suis très content du résultat. Le jeu est une fable qui parle de norme et de discrimination, et le fait plutôt bien, il me semble.

Globalement, 2024 était une année pleine de promesses, qui vont se réaliser en 2025. J’ai hâte !