Une extension pour le jeu Wiraqocha, introduisant de nouvelles troupes afin que chaque joueur se compose sa propre expédition, de nouvelles tuiles pour agrandir la Vallée, des cartes Pacte qui viennent jeter le trouble parmi les joueurs, ainsi que des paravents pour cacher ses cristaux et ses artefacts… rien que ça.
Point de vue matériel, on peut la considérer comme une « petite » extension – encore que personnellement, je trouve son contenu plutôt correct par rapport à son prix, une quinzaine d’euros. Reste que les changements introduits par cette extension, eux, sont de taille. Commençons par les nouvelles troupes : une planche de stickers de format identique à celle du jeu de base, afin de coller ces nouveaux stickers sous les pions de bois de celui ci. En début de partie, chacun choisit en secret derrière son paravent (où les correspondances recto-verso des pions ont été rappellés) quelle face de chacun de ses pions il va utiliser. L’extension introduit trois nouvelles troupes ainsi qu’un camp de base alternatif – ça fait du choix. Dés le début de partie, on commence à définir un axe stratégique. Les nouvelles troupes sont détaillées dans la règle (disponible ici), mais pour résumer, disons que le Patrouilleur défend les cases adjacentes, le Colon récolte plus de ressources, et l’Escouade Héliportée vient contester la suprématie aérienne des Zeppelins. Accessoirement, on trouvera aussi sur cette planche de stickers les versions améliorées des trois pions neutres qu’il est possible d’acquérir grâce aux cartes technologies.
Ensuite, les cartes Pacte : ce fut la partie la plus délicate à équilibrer. Bien que je n’ai pas grand chose à reprocher au jeu de base, il faut reconnaitre qu’il ne donnait pas le droit à l’erreur, et que se faire rouler dessus par plusieurs joueurs dans le même tour ou partir sur une mauvaise position de développement pouvait mettre un joueur hors course. Wiraqocha est un jeu de conquête agressif, je n’ai pas de problème avec ça – il faut bien des perdants – mais je n’aimais pas l’idée qu’un joueur puisse s’ennuyer et subir le jeu à cause d’un ou deux mauvais tours consécutifs en début ou en milieu de partie. Je voulais donc rajouter un « élastique », un mécanisme de rattrapage qui permette aux joueurs un peu en retard de revenir dans la course, sans enlever le mérite et l’avantage des autres joueurs ayant pris l’ascendant.
Lorsqu’un joueur a moins de pions sur le plateau que tous les autres joueurs, il peut passer un pacte avec Quezacoatl, le Serpent à Plumes, gardien de la vallée. Le joueur prend une carte Pacte, qui lui permettra à ce tour et aux tours ultérieurs de bénéficier d’un bonus substantiel : deux ressources et un dé supplémentaire. Mais plus le joueur décidera d’utiliser cette aide, plus il oubliera les promesses faites à l’Impératrice, et les conditions de victoire du jeu de base se fermeront pour lui petit à petit. Après le sixième tour d’utilisation du pacte, il ne lui reste pour gagner qu’une seule condition de victoire, secrète, qui est détaillée au verso de sa carte pacte. Il doit maintenant aider le peuple de la Vallée contre ses compatriotes impérialistes.
Le système produit bien l’effet voulu, et ajoute une dose de bluff concernant l’objectif secret qui est assez sympathique. Je profite de cet article pour combler un manque de la règle, une précision qui n’avait pas été faite : lorsque le Rayon de la Mort détruit un territoire nécessaire à un objectif secret, l’objectif peut toujours être rempli, le joueur concerné doit juste contrôler un territoire de moins.
L’extension contient également six nouvelles tuiles, qui peuvent remplacer ou s’ajouter à celles du jeu de base selon le type de jeu que l’on souhaite et le nombre de joueurs. Certains trouvaient que la configuration à 4 joueurs était un peu exiguë, et donc vraiment agressive. Ca plait à certains, à d’autres moins, j’ai donc saisi l’opportunité d’avoir plus de tuiles pour permettre aux gens qui le souhaitaient d’avoir plus d’espace. Les nouvelles tuiles amènent chacune une petite règle additionnelle, que je ne détaillerais pas ici.
Au final, je suis vraiment content de cette extension. Elle m’a permis de concrétiser pas mal d’idées qui avaient été écartées dans le jeu de base, et m’a aussi permis de « recadrer » le jeu pour qu’il puisse trouver un peu plus son public. J’assume tout à fait le fait qu’un jeu ne puisse pas plaire à tout le monde, mais certaines des remarques faites par des joueurs m’ont permis de réfléchir au fait qu’il était quand même perfectible sur certains points, sans pour autant faire de compromis sur les axes forts du jeu, que je voulais conserver tels quels. Ca reste un jeu de castagne, où ça parle beaucoup autour de la table, et où ceux qui préfèrent les jeux plus linéaires et avec moins d’interactions verront du « King Making », du « Bash the Leader », et bon nombres de soi disant déséquilibres. Les joueurs sont bien trop habitués à ce que le jeu régule pour eux les possibilités de victoire, de défaite et de développement. Tout ça pour qu’il n’y ait pas de réel perdant, qu’on reste tous bons amis avec des scores bien serrés à la fin – puisque mathématiquement les gains ne permettent pas un résultat très différent. En passant, l’effet Bash The Leader, que je trouve pour ma part tout à fait naturel voire sain, puisqu’il permet la pire des mauvaise foi, les vocations de matyres, est un peu atténué par l’utilisation des paravents. Bien que ça réduise ces sympathiques sessions de diplomatie perfides, ça permet surtout de réduire le temps de jeu, en évitant que les derniers tours ne s’éternisent. Une bonne chose, donc.
On peut trouver cette extension, entre autres, sur le site de Sit Down, ici !
Illustrations : Yuio